Le Singe et son Maître Joseph Poisle-Desgranges (1823 - 1879)

Allons, marquis, faites le beau
Dressez-vous/s'il vous plaît. Otez votre chapeau. ^ -
Saluez humblement ces messieurs et ces dames
Balayez devant eux... Assez ! Prenez ces lames.
En garde... Ripostez*.. Hé bien ! êtes-vous prêt ?
Parez donc ce coup de fleuret.
La main droite ; à présent... sinon je vous bàtônne.
Surtout dites merci» si le public vous donné.
C'est ainsi qu'à son singe uh homme mal vêtu
Parlait après l'avoir battu.
Les passants pour le voir* accouraient en grand nombre ;
Et le singe excité, quoiqu'il eût l'humeur sombre,
Ramassait avec soin les sous qu'on lui jetait.
Mais, s'étant aperçu que son maître empochait
Ce que seul il avait su gagner sur la place,
L'animal crut devoir faire un peu la grimace,
Puis se plaindre hautement.
L'homme, sans répliquer à son raisonnement,
Au singe démontra qu'on a mauvaise grâce
A.gèmir quand on sent la chaîne autour du cou,
Et, pour l'amadouer, notre honnête filou
Lui fit faire en cadence un tour de passe-passe.

Que l'on soit artisan, commis ou rimailleur,
Ce n'est pas là ce qui m'occupe
Mais ce que je voudrais, c'est Que le travailleur
Du paresseux ne fut plus dupe.

Livre II, fable 16




Commentaires