Un loup, un vrai Coriolan,
Sous le fardeau de tant de crimes ;
Qu’à Mars le bourreau Tamerlan.
Ne pouvait fournir de victimes,
Fut pris par un mal d’estomac.
Son cousin et cher camarade,
Vint le trouver dans son hamac :
Le voyant battre la chamade,
Il lui dit: « Eh ! mon pauvre fils,
Ce qui te cause mal au ventre,
Peut être bien une brebis,
Ou son petit, que tu-veux rendre ;
Lève-toi partons pour l'affut,
Tu verras qu'un clou chasse l'autre. »
« Tais-toi, je pense à mon salut, »
Lui répondit le faux apôtre.
« Dés aujourd'hui je fais serment,
De ne vivre que d'abstinence ;
Je veux mourir en pénitent,
Pour soulager ma conscience ;
Je vois Alecto de l'enfer,
De Pluton m’apporter les chaînes,
Du forfait c'est le fruit amer,
Que nous gagnons par nos fredaines.
Si je renais à la santé,
J'abandonne une vie acerbe ;
On louera ma frugalité,
Je ne mangerai que de l'herbe ;
Je saurais garder les troupeaux,
Tel que le fait un chien fidèle ;
Le berger peut être en repos,
Quand Martin fera sentinelle,
Oui ! j'irai répandre mon sang,
Pour toujours aider l'innocence ;
Je mettrai le loup sur le flanc,
S'il commet la moindre imprudence. »
Après cette conversion,
Le cousin secouant la tête,
Se dit, il n’a plus de raison,
« Je te perds donc ma pauvre bête. »
Il part en faisant ses adieux,
Pour retourner dans son bocage,
Puis revient pour fermer les yeux,
A ce converti personnage.
Il le voit devant un agneau,
Que dévore son Éminence ;
« Je vois, tu défends le troupeau,
Et prends grand soin de l'innocence. »
D'un air moqueur le vieux filou,
Lui répond, « mon cher camarade,
Je suis mouton étant malade,
Rétabli, je redeviens loup. »