Une vigilante fermière,
Pour garder sa cour solitaire,
Soir et matin,
Attachait dans la même niche
Son gros et paisible mâtin
Avec un vieux roquet, de grognements peu chiche.
Car pour une ombre, un bruit lointain,
La criarde et hargneuse bête
Aboyait, en montrant sa laide et rogue tête,
Tandis que le robuste chien,
Conservant un noble maintien,
Regardait, appuyé sur ses pattes puissantes,
Les hommes, les chevaux et les brebis bêlantes,
Sans jamais leur montrer la dent.
Mais fatigué des cris du roquet impudent,
Se retournant, un jour, avec impatience,
Le cheval de timon dit au bœuf ruminant :
<< Ne trouves - tu pas surprenant
Que le chien vigoureux qui nous garde en silence
Joint le calme à la majesté,
Quand son faible voisin se targue d'insolence ?
Ah ! si l'un de malice et de méchanceté,
Répond le bœuf, est un prodige,
L'autre ne peut avoir que de la dignité,
Car, tu le sais, noblesse oblige. »