

Sur le souple coussin d'une molle bergère,
Le front penché nonchalamment,
Et la taille négligemment
Drapée en les replis d'une étofse légère.
Une fille, aux dix-neuf printemps.
A l'œil de chérubin, de ses cheveux flottants
Fait tomber une marguerite
Qui, séparée hier de ses brillantes sœurs,
Sur la belle étalait ses plus fraîches couleurs.
Soudain la jeune enfant prend sa fleur favorite,
Et, pensant à son fiancé,
Elle n'a rien de plus pressé
Que de tirer un blanc pétale.
« M'aime-t-il, se dit-elle ; aurais-je une rivale ?... »
Ce soupçon passager ralentit son ardeur.
Elle poursuit avec lenteur
Sa consultation. « Croyez-vous aux miracles ?
À la questionneuse avait dit bien souvent
Maint superstitieux, qu'elle prit pour savant,
Interrogez les fleurs, vous aurez des oracles. »
Notre héroïne alors attendait un arrêt
De l'humble pâquerette, en langage muet,
Lorsque la marguerite blanche
Dit : « Pourquoi votre main retranche
De mon calice aimé le plus bel ornement ?
Vous attendez un jugement
De moi, répondez- vous... pour savoir s'il vous aime...
Enfant, sachez-le bien : le germe précieux
De votre destinée est toujours en vous-même.
Demandez la lumière au Souverain des cieux,
A ses divines lois, à votre conscience,
Et vous aurez bientôt, j'en ai la prescience,
Reconnu les écarts d'une profonde erreur.
La jeune fille doit interroger son cœur :
S'il a de la vertu, s'il est fort de tendresse,
Si tous ses sentiments respirent la noblesse,
Elle peut espérer, en promettant sa main,
De trouver le bonheur et la joie en l'hymen. »
N'effeuillez pas les fleurs pour chercher à surprendre,
A saisir au hasard, le secret du destin,
Qui devine est souvent sujet à se méprendre.