Le Loup et l'Agneau

Louis-Dominique Champeau (1817 - 1880)


Le loup (bas)

Suivons le cours de ce ruisseau.
Quelque brebis, par aventure,
Peut venir en ce lieu chercher une onde pure…
Justement ! je vois un agneau.
Je suis à jeun, de faim j’enrage.

(Haut)

Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage ?

L’agneau

Que Votre Majesté ne se mette en colère ;
Mais plutôt qu’elle considère
Que je me vas désaltérant
Dans le courant,
Plus de vingt pas au-dessous d’elle ;
Et que, par conséquent, en aucune façon
Je ne puis troubler sa boisson.

Le Loup

Tu la troubles, te dis-je, animal sans cervelle !
Et je sais que de moi tu médis l’an passé.

L’Agneau

Comment l’aurais-je fait si je n’étais pas né ?
Informez-vous ; je tette encor ma mère,

Le Loup

Si ce n’est toi, c’est donc ton frère.

L’Agneau

Je n’en ai point.

Le Loup

C’est donc quelqu’un des tiens ;
Car vous ne m’épargnez guère,
Vous, vos bergers, et vos chiens,
On me l’a dit ; il faut que je te mange.

L’Agneau

Cruel ! tôt ou tard le ciel venge
L’innocence opprimée, et frappe les méchants ;
Ses plus terribles coups sont pour les plus puissants.





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