Autrefois, un voleur essaimant la campagne
Avançait lâchement, procédant comme suit :
Pour ne pas être pris, pour éviter le bagne,
Redoutant la lumière, il attendait la nuit.
Un soir, il pénétra, dans une ancienne ferme
En s’assurant d’abord que le fermier dormait,
Que personne en ces lieux n’attendait de pied ferme
Le bravache brigand, plus discret que jamais.
Il scruta alentours ; à la main, une torche,
Il allait lentement, pesant ses moindre pas,
De la paille de blé, du foin, quelques grains d’orge
Ici, pour tout butin, en guise de repas.
Prêt à quitter l’endroit, notre folle fripouille
Fit face, en ressortant, à un coq qui veillait
Et pour ne surtout pas rentrer chez lui bredouille,
Il saisit par le cou l’animal grassouillet.
« Le butin n’est pas lourd, l’entreprise fut vaine,
Nous revenons Gros-Jean suite à notre forfait,
Mais dans notre malheur, célébrons notre veine,
Nous rapportons un coq, notre repas est prêt ! »
L’animal nommé par ce manant malhonnête :
Le héros de la fable, un oiseau érudit
N'était pas si pressé de concéder sa tête ;
Il fixa le filou, se dressa et lui dit :
« Si vous me sacrifiez, afin de satisfaire,
Votre appétit d’un jour, vos instincts, votre faim,
Pensant qu’un bon repas fera bien votre affaire,
Vous oubliez que pour parvenir à vos fins
Il vous faudra priver, en premier lieu, les hommes
Du moyen le plus sûr, pour eux, de s’éveiller,
Sans mes chansons, jamais ne prendra fin leur somme,
Pour eux, chaque matin, je dois m’égosiller. »
En entendant ces mots, le voleur sans morale,
Le malfrat malheureux, sans respect, sans honneur
Cuisina le poulet sur le feu, dans la poêle,
Enfin débarrassé de ce geignard gêneur.
« Les humains, endormis ? Mais voyons quelle chance !
Lança notre larron, ravi, tout en mangeant,
Au pot-au-feu le coq, qui, par sa vigilance,
A pour curieux destin de réveiller les gens ! »
Inspiré de Les deux voleurs et le coq dont je ne sais plus l'auteur.