Un épervier sous ses serres avait pris
Sa nourriture, une pauvre perdrix,
Et lui disait : « Je te tiens, ma petite,
Finissons-en, il vaut mieux, au plus vite.
C’est que, vois-tu, comme chacun, j’ai faim,
Tu vas mourir, c’est vrai mais pas en vain.
Cependant, il faut bien t’y résoudre.
Quand un chasseur, bien plus vif que la foudre,
De son fusil, le métal meurtrier
Abat d’un coup notre oiseau carnassier.
Mais la perdrix n’était qu’abasourdie.
Il s’en saisit, pour lui donner la vie.
Il désirait l’avair pour ses enfants,
Comme un jouet, pourtant encor vivant.
Le chasseur donc la met en gibecière,
Les enfants jouent puis lui font son affaire.
Tout en disant : « Ne faisons pas souffrir,
Cet animal encor bon à rôtir.
À la perdrix, qu’importait-il, en somme,
Qui la mangeât de l’épervier, de l’homme ?
Dans les deux cas, la pauvre s’en alla ;
C’était tomber de Charybe en Scylla !
Sur une idée de Eugénie et Laure Fiot, Fables Nouvelles, 1851
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6135040b/f36