Les oisons s'ébattaient le long d'une rivière ;
Ils étaient suivis de leur mère
Qui, pour les surveiller, partout les escortait ;
Sans cesse, elle leur répétait :
« N'allez pas vous lancer au beau milieu du fleuve ;
Je sais que si jamais vous tentez cette épreuve,
Vous vous en trouverez bien mai,
Car le courant est fort au milieu du canal !
De ce cours d'eau rapide, il faut redouter l'onde.
Ayez-en, mes enfants, une terreur profonde ;
Car nul de vous n'est encore assez fort
Pour pouvair l'affronter sans grand danger de mort. »
« Quoi, dirent les oisons, tu crains ces eaux tranquilles ?
Nous pouvons les braver ! car nous sommes agiles.
Chacun de nous est bon nageur ;
Nous ne devons pas avair peur !
Attends un instant, pauvre mère,
Et tu pourras juger de notre savair faire ! »
Ainsi parlèrent tous ces sots ;
Ils crurent qu'ils pourraient se diriger sans peine,
Et s'en allèrent tous au beau milieu des flots.
Le fleuve impétueux, à l'instant, les entraîne.
Les malheureux oisons, malgré tous leurs efforts,
Ne peuvent regagner les bords.
Ils ne sont pas les seuls ! Il arrive sans cesse
Que l'homme, méprisant l'avis de la sagesse,
S'élance sur des flots qu'il croit pouvair dompter,
Puis, vers le précipice, il se voit emporter.