Le Lion, le Serpent, la Panthère et la Cigale Fables Sénégalaises

Un Lion, un Serpent, avec une Panthère,
Résidaient dans un même fort.
De cet effroyable repaire
Planaient sur le canton la terreur et la mort.
Les animaux étaient d'accord
Qu'il fallait à tout prix tâcher de s'en défaire
Mais par quel moyen ? Le plus fort
N'y pensait qu'avec épouvante.
La Cigale leur dit « Moi, je puis, je m'en vante,
Vous délivrer sans grand effort. »
Chacun lui rit au nez et l'on se moque d'elle.
Elle part, cependant, et parvient, vers le soir,
Jusqu'au seigneurial manoir.
Nos triumvirs rêvant quelque fureur nouvelle,
Y digéraient couchés, l'un de l'autre ombrageux.
La Cigale s'approche d'eux,
Gratte le sol à sa manière,
Et fait jaillir des grains de terre
Sur le nez du Lion et jusque dans ses yeux.
Le Lion, qui n'est pas animal débonnaire,
Cherchant en vain son adversaire,
Se bat les flancs entre en colère
Et lance à ses voisins un coup-d'œil furieux.
Panthères n'aiment pas qu'on les regarde en face.
La nôtre s'épouvante et croit qu'on la menace;
Elle se jette avec audace
Au-devant des coups du Lion.
Celui-ci la terrasse, et la laisse expirante
Près de leur caverne sanglante.
Mais dans le feu de l'action
Sa griffe par mésaventure
Blesse mortellement le reptile qui dort.
Le Serpent blessé siffle, il se redresse, il jure,
Sur le Lion vainqueur il s'élance, il le mord.
Quand le soleil revint éclairer la nature,
Le triumvirat était mort.

Les méchants vous font la guérie
Ils sont forts, ils sont nombreux!
Divisez-les, qu'ils se battent entre eux;
Puis, alors, laissez-les faire.

Fable 23




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