Un mulet trop nourri de foin, d'orge et d'aveine,
Oublia qu'il était mulet,
Et, pleine d'une arrogance vaine,
Se vantait qu’aux chevaux de la plus longue haleine
Il pourrait prêter le collet.
« Ma mère, disait-il, généreuse cavale,
D’un prince, d’un héros, vit son dos honoré,
Et blanchissant d’écume un riche frein doré,
En vitesse, en vigueur, n’eut jamais son égale ».
Ainsi parlait ce fat, lorsqu’inopinément
Le cas vint où de courre il était nécessaire.
Il galopa si lourdement,
Qu’indigne fils d’une jument,
Il reconnut enfin qu’un âne était son père.
Le bonheur continu nous rend audacieux :
Le malheur nous ouvre les yeux.
Note de l'auteur : Disons mieux : La prospérité, la confiance en nous-mêmes, nous aveugle ; mais l'adversité, notre impuissance, nous ouvre les yeux.