Si je pouvais Auguste Fisch (1814 - 1881)

Un lézard dit un jour : — Oh! quelle douce vie
Que de pouvoir sauter si haut!
Ce crapaud est heureux; oui vraiment, je l'envie;
Si je pouvais être crapaud !

Le crapaud voit passer un moineau qui se pose
Plus haut que lui sur un rameau.
— Voler dans l'air, dit-il, oh! l'agréable chose !
Si je pouvais être moineau !

Un canard près de là nage et plonge la tête
Dans l'eau d'un étang; par hasard
Le moineau l'aperçoit et dit : — L'heureuse bête
Si je pouvais être canard

Le canard voit sortir un lapin de son gîte
Et bondir dans le bois voisin.
— Oh! quel bonheur, dit-il, de courir aussi vite!
Si je pouvais être lapin.

Le lapin aperçoit un chien qui paraît être
Fort heureux. — Oh! je voudrais bien,
Dit-il, être à quelqu'un; moi, je n'ai point de maître.
Oh! si je pouvais être chien !

Passe un cheval tirant un pesant équipage.
Le chien dit : — Heureux animal
De travailler ainsi ! moi, je suis sans ouvrage !
Si je pouvais être cheval !

Le cheval à son tour dit : — Je suis las ! Je tire
Du matin jusqu'au soir ce char;
Ce lézard est heureux, là-bas !. puis il soupire : *
Si je pouvais être lézard !

Et le lézard, surpris de voir chacun paraître
Mécontent de ce qu'il était,
Se ravisant, cria : — Lézard Dieu m'a fait naître,
Je veux rester ce qu'il m'a fait.

Ne soyons pas ingrats, et n'envions personne ;
De nous plaindre nous aurions tort;
Soyons reconnaissants de ce que Dieu nous donne
Et satisfaits de notre sort !



Fable 12

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