Dans un village, un bon maître d'école,
Devant ses écoliers prit un jour la parole,
Et dit ; « Monsieur Vincent, si j'en crois ce rapport,
Qu'à l'instant me fait votre père,
Hier vous eûtes le grand tort,
Dans un accès de coupable colère,
De manquer do respect aux autours de vos jours !:
La colère !... Ah ! Vincent, quelle chose honteuse !...
Ce vice, enfants, nous ôte le secours
De la raison, cotte voix généreuse,
Présent de l'Éternel! Privé do son concours,
Un mortel redescend jusqu'à l'état de bête...
« Oui, Sénèque le dit, la plus belle conquête,
Pour l'homme, est de savoir vaincre ses passions !... »
En prononçant ces mots, un beau geste oratoire
Renverse par malheur une énorme écritoire,
Dont l'encre vu couvrir les compositions
De nos savants on herbe. Or, le maître s'empresse
De saisir l'encrier ; mais dans sa maladresse
Il glisse, tombe, roule et fuit dans le gâchis
Prendre un bain d'encre à ses habits.
Aussitôt furieux, notre homme se relève,
Ramasse l'encrier, au loin veut le jeter ;
Et l'objet mal lancé vole et blesse l'élève
Que notre précepteur venait d'admonester.

Les lois de la raison trouvent beaucoup d'apôtres,
Tant qu'on se borne à discourir ;
Mais il est difficile, alors qu'il faut agir,
De mettre en action ce que l'on prêche aux autres.

Livre I, fable 6


Vaincre ses passions ? En les réprimant ? On faisant comme si elles n'existaient pas ?

Commentaires