Une étourdie, une tête à l’évent,
Une linotte, c’est tout dire,
Sifflant à tout propos, et tournant à tout vent,
Quitta sa mère, et voulut se produire,
Se faire un sort indépendant :
Un nid chez soi vaut mieux souvent
Que ne vaut ailleurs un empire.
Il s’agit de trouver un bel emplacement.
Ma folle, un jour, s’arrêta près d’un chêne :
« C’est, dit-elle, ce qu’il me faut ;
Je serai là comme une reine ;
On ne peut se nicher plus haut. »
En un moment le nid s’achève ;
Mais deux jours après, ô douleur !
Par tourbillons, le vent s’élève,
L’air s’embrase, un nuage crève.
Adieu les projets de bonheur !
Notre linotte était absente.
À son retour, Dieu ! quels dégâts !
Plus de nid ! Le chêne en éclats !
« Oh ! oh ! Je serai plus prudente.
Dit-elle ; logeons-nous six étages plus bas. »
Des broussailles frappent sa vue,
La foudre n’y tombera point :
« J’y vivrai tranquille, inconnue,
Et ceci, pour le coup, est mon fait de tout point. »
Elle y bâtit son domicile.
Moins d’éclat sans plus de repos ;
La poussière et les vermisseaux
L’inquiètent dans cet asile :
Il faut prendre congé ; mais, sage à ses dépents,
D’un buisson qui domine, elle gagne l’ombrage,
Y trouve des plaisirs constants,
Et s’y préserve, en même temps,
De la poussière et de l’orage.

Si le bonheur nous est promis,
Il n’est point sous le chaume, il n’est point sur le trône.
Voulons-nous l’obtenir, amis ?
La médiocrité le donne.

Livre III, fable 4




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